Ressentir de la colère ou toute autre émotion au travail est normal. Il convient en premier lieu d’identifier nos émotions pour apprendre à les gérer et à ne pas se laisser envahir par ces dernières.
Il existe six émotions primaires : la peur, la joie, le dégoût, la tristesse, la colère et la surprise. Celles-ci ont une composante cognitive, comportementale ainsi que physiologique. La composante cognitive correspond aux changements d’états mentaux. Sous l’influence de la colère, par exemple, on peut prendre des décisions irréfléchies.
La composante comportementale renvoie à toutes les manifestations comportementales d’une émotion. Elle nous pousse à l’action. Et enfin, la composante physiologique se réfère à l’ensemble des manifestations physiologiques en réaction à un évènement émotionnel. Par exemple lorsqu’on a peur, notre fréquence cardiaque croît, on tremble, on ressent des sueurs froides…
Savoir parfaitement contrôler ses émotions n’est pas possible mais vous pouvez apprendre à réagir en fonction du contexte pour éviter d’être submergé par un sentiment désagréable. Voici quelques conseils pour vous y aider
Pourquoi est-il important d’exprimer ses émotions au travail
Bien que communément, les employés masquent leurs émotions, de peur qu’elles compromettent leur environnement de travail, porter un masque de neutralité n’est pas la meilleure des stratégies. En effet, il est important d’exprimer ses émotions pour tisser des liens interindividuels solides avec ses collègues. Par ailleurs, développer ses compétences émotionnelles (Lhuillier, 2006) au travail permet de mieux comprendre le comportement de vos pairs mais aussi de réagir en conséquence.
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Comprendre l’impact et la source de ses émotion
Ne pas exprimer ses émotions peut nuire à la santé des individus (insomnie, stress, céphalée, maux d’estomac, irritabilité, difficulté de concentration…), c’est pourquoi il s’agit d’apprendre à les extérioriser avant de les gérer.
Pour être capable d’exprimer au mieux ses émotions, il est primordial de comprendre la source de l’inconfort émotionnel ressenti. Ce dernier est vecteur d’émotions négatives qui focalisent notre attention sur des aspects particuliers d’une situation.
Voici les situations les plus courantes relatives à un inconfort émotionnel :
Perte de contrôle de l’activité
Une situation qui entraîne une perte de contrôle de l’activité est souvent liée à un sentiment d’impuissance et de perte de maîtrise. Cette situation génère du stress et des émotions négatives (doutes, colère, peur…)
Surcharge émotionnelle
Dans un contexte de multiples sollicitations, il est possible de se sentir dépassé et de ressentir une fatigue attentionnelle et cognitive. Cette situation engendre des émotions négatives (frustration, angoisse, anxiété…) et une intensification du travail.
Relation conflictuelle
Le manque de reconnaissance au travail, le contrôle hiérarchique excessif, les tensions interindividuelles, le manque de soutien de ses pairs, le sentiment d’isolation sont sources d’inconfort émotionnel.
Conflit éthique
Le conflit éthique est lié au fait que le travail effectué entre en contradiction avec ses valeurs personnelles. Il est élevé dans les entreprises de centres d’appels ou dans les hôpitaux, générant alors de la culpabilité, de la honte et de la frustration…
Toutefois, les émotions négatives n’engendrent pas seulement des conséquences néfastes. En effet, elles peuvent être un bon indicateur de mise en action. Par exemple, vous êtes en situation de conflit avec votre manager au sujet d’un choix d’approche pour un projet. Il est alors essentiel de partager ses émotions : je pense qu’il serait préférable de fonctionner comme ça… je ne suis pas d’accord avec l’approche, voici ce que je ferais…. Ainsi, partager son ressenti permet de progresser dans son travail et d’améliorer ses relations interindividuelles.
Créer des liens avec ses collègue
Le soutien social est un facilitateur permettant de réguler ses émotions. En effet, plaisanter avec ses collègues (Molinier, 1998) en situation de crise permet de relâcher la pression et de prendre du recul face à un contexte de travail intense. Le soutien social permet alors aux salariés d’avoir une meilleure estime d’eux-mêmes, de se sentir accompagnés et compris. Par exemple, se réunir après le travail pour passer un bon moment avec son équipe permet de ressentir des émotions positives et de renforcer la cohésion de groupe.
Exprimer ses émotions positives au travail
Les émotions positives au travail (joie, fierté, inspiration…) contribuent à atteindre ses objectifs, à déployer sa créativité ainsi qu’à élaborer des solutions aux problèmes. Exprimer ses émotions permet alors d’être plus flexible, plus imaginatif et plus productif. Il est également prouvé que celles-ci augmentent la tendance à s’engager dans de nouvelles activités. Elles permettent donc de diversifier ses activités (Cunningham, 1988).
Par ailleurs, les émotions positives renforcent également le comportement d’aide et de coopération au sein d’une équipe de travail et sont la cause de la réussite professionnelle.
Valoriser les émotions positives dans une organisation est donc essentiel pour promouvoir la satisfaction et la motivation au travail.
Comment apprendre à gérer ses émotions au travail ?
Pour gérer ses émotions, il convient d’apprendre à réguler ses émotions négatives et à partager ses émotions positives. La liste de conseils et méthodes n’est pas exhaustive et peut ne pas correspondre à tout le monde. Il s’agit de retenir ce qui vous semble le plus judicieux et adapté à votre situation professionnelle pour vous permettre d’apprendre à développer vos propres techniques. Pour bénéficier d’un accompagnement personnalisé, il est possible de recourir au coaching professionnel du cabinet Group 3’C.
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Accepter, Identifier et Comprendre
Dans un premier temps, il est nécessaire d’identifier l’émotion que l’on ressent pour pouvoir par la suite la réguler. Il ne s’agit pas de la réprimer mais au contraire de l’accueillir pour l’identifier et la comprendre. Il est capital de nommer et de mesurer ce que l’on ressent par le biais de ce type de questions :
- Qu’est-ce que je ressens ?
- Pourquoi je ressens cette émotion ?
- Sur une échelle de 1 à 10 à quel point mon émotion est forte ?
- Est-ce que cette émotion est passagère ou va-t-elle m’impacter sur le long terme ?
- Qu’est-ce qui cause mon ressenti?
Stratégie de régulation de l’émotion centrée sur les antécédent
Se défouler, pratiquer un sport, méditer, dormir, supprimer ses émotions, écouter de la musique ne sont qu’une infime partie des stratégies les plus connues pour réguler ses émotions. Ici, nous vous présenterons un modèle de stratégies de régulation émotionnelle (Gross, 2007) pour agir directement sur l’origine du ressenti émotionnel.
Les stratégies centrées sur les antécédents s’axent sur les événements qui précèdent la réponse émotionnelle.
Sélectionner la situation
Il s’agit d’éviter ou au contraire d’approcher certains lieux, contextes ou personnes qui provoquent des émotions. C’est une stratégie préventive qui régule le déclenchement émotionnel. Ne pas converser avec un client de peur, par exemple, d’exploser de colère vis-à-vis de son comportement et de déléguer la discussion à un collaborateur permet d’éviter de ressentir une émotion négative qui risque d’alimenter votre journée.
Modifier la situation
Cette stratégie a pour but de changer la situation dans laquelle on se trouve pour modifier son impact émotionnel. Par exemple, vous devez conduire une réunion importante mais elle doit se tenir dans une salle où un collègue a eu un accident de travail grave. La réaliser dans cette pièce ferait ressurgir de fortes émotions et il vous serait difficile de la mener à bien. Pour changer cela, il convient de demander à changer de lieu, c’est-à-dire à modifier votre situation.
Déployer son attention
Lors d’un événement fort en émotion. En effet, il s’agit de concentrer son attention sur des aspects non-émotionnels pour éviter d’éprouver une émotion. Par exemple, un client fait une critique sur une méthode de travail qu’il ne connaît pas. Cependant, ce client est essentiel à la réussite de votre projet. Vous sentez l’énervement monter. Au lieu de lui dire ses quatre vérités et de mettre en péril votre travail, focalisez-vous sur ce qui vous entoure (les documents, la couleur des murs, l’environnement extérieur…). Vous serez alors plus calme et apte à terminer la réunion sans accroc.
Réévaluer sa Cognition
Cette technique tend à interpréter une situation d’une certaine façon plutôt que d’une autre.
Par exemple, vous expliquez un sujet important à votre collègue mais celui-ci n’écoute pas attentivement et baille. Vous pouvez interpréter ce signal comme étant de l’ennui, ce qui vous énerve car vous parlez d’un sujet important. Ou lui demander ce qu’il se passe et comprendre que son enfant est malade et qu’il n’a pas dormi car il a dû s’en occuper.
Gestion des émotions en entreprise : quels avantages?
Les émotions sont des signaux à prendre en compte en entreprise pour assurer aux employés un environnement de travail sain et à l’écoute de leur besoin. Soutenir l’expression et la régulation émotionnelle s’accompagnent de multiples bénéfices tels que la satisfaction au travail, la motivation, la créativité ainsi que la productivité…
Mieux gérer ses équipes en tant que manager
Porter son attention sur les émotions au travail en tant que manager est un réel atout permettant d’augmenter la production et l’engagement au travail de son équipe. En effet, il s’agit d’avoir la capacité de se décentrer de ses propres aspirations pour se tourner vers les besoins de son équipe. Créer de la cohésion, de la reconnaissance, discuter des désaccords, féliciter en cas de réussite ou encourager en cas d’échec sont des aspects relatifs à la communication de ses émotions. Dévoiler ses émotions en tant que manager est souvent perçu comme un acte de considération pour les membres de son équipe. Ainsi, communiquer ses émotions au sein d’une équipe est vecteur de motivation.
Pour développer vos compétences managériales, vous pouvez participer aux formations des fondamentaux du management ou à la formation des équipes performantes du cabinet de Group’3C.
Recourir à l’intelligence émotionnelle
Goleman (1998) définit l’intelligence émotionnelle comme « la capacité de réguler et de maîtriser ses propres sentiments et ceux des autres ». En d’autres termes, l’intelligence émotionnelle permet alors de gérer ses propres émotions mais aussi de comprendre celles des autres. Nous vous présentons son modèle qui regroupe cinq types de compétences émotionnelles pour apprendre à réguler ses émotions :
Avoir conscience de soi
La conscience de soi est la capacité à reconnaître ses propres émotions et à les comprendre. Il s’agit alors d’observer son ressenti pour lui donner un sens afin de le transformer en actions concrètes. Cette faculté permet de gérer les réactions émotionnelles néfastes. Par exemple, si un individu au travail vous insulte, en ayant conscience de vos émotions vous serez capable de ne pas réagir à cette provocation.
Maîtriser et gérer ses émotions
L’autorégulation est la capacité à gérer ses émotions et à les adapter à la situation. C’est la faculté à apprendre à maîtriser sa colère, sa tristesse…
Se motiver pour suivre ses objectif
La motivation est le mouvement volontaire dirigé vers un objectif. Utiliser ses émotions pour réaliser ses objectifs permet d’être engagé et exigeant au travail mais aussi de mener des initiatives.
Être empathique
C’est la faculté à adopter la vision d’autrui et à développer des bonnes relations avec lui. Ce processus cognitif est essentiel au travail car il permet de comprendre le contexte et les motivations amenant une personne à réagir.
Développer ses aptitudes sociales
L’aptitude sociale est une compétence qui nous lie à autrui : Écouter, entamer une conversation, remercier… . Elle permet de communiquer, de se contrôler, d’exprimer ses émotions avec autrui, et sous-tend nos actions.
Au travail, il est important de développer la communication, le leadership, la gestion du changement ou encore la capacité à mobiliser une équipe.
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Sources externes :
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- Philippot, P. (2011). Chapitre 5. La régulation émotionnelle. Dans : , P. Philippot, Émotion et psychothérapie (pp. 115-156). Wavre: Mardaga.
Article écrit par Nour Ibrahimi – Future psychologue du travail engagée